Depuis 2020, La Place de la Danse renforce son accompagnement aux artistes (coproduction, mise à disposition d'espaces…) en proposant à trois chorégraphes de la Région Occitanie de devenir complices de ses missions.
À partir de février 2024, trois nouveaux chorégraphes deviennent les artistes "accordé·e·s" de La Place de la Danse : Nicolas Fayol, Émilie Labédan et Chloé Zamboni.
• Comment t'es-tu formé à la danse ?
Je me forme à la danse principalement en imitant. J'imite les danseurs, les danseuses, j'imite la musique, j'imite les chorégraphes avec qui je travaille. J'ai aussi fait une école de danse académique (l'école internationale de danse Jazz, Rick Odums) et suivi des stages, notamment avec Imre Thormann et Hervé Langlois. Depuis que j'habite loin des grandes villes, je m'entraîne beaucoup seul ou avec un·e copain-copine, on danse chacun notre tour, on se regarde.
• Tu décris le breakdance que tu as pratiqué à tes débuts comme un breakdance « rural » : de quoi s'agissait-il ?
Il s'agit peut-être d'une question de tempo, le break va bien trop vite pour moi. C'est dans la lenteur que je trouve un sens et un goût à ces gestes, et dans la lenteur les gestes se transforment, et deviennent autre chose.
Ça ne ressemble plus à du break, mais c'est mon point de départ.
• De quoi ta danse est-elle nourrie ? Qu'est-ce qui t'anime quand tu ne danses pas ?
La danse se nourrit des espaces dans lesquels elle traîne et des gens avec qui elle échange.
En ce moment je danse beaucoup dans mon appartement. La danse est toujours entrecoupée de gestes triviaux : ranger les jouets de mon fils, plier le linge ou arroser les plantes… c'est vrai que prendre soin de l'espace que j'habite me réjouit et m'inspire. Il y a aussi la littérature, l'amour, les blessures, les animaux, la marche, la cuisine, la musique (je n'aurais pu répondre que ça : la musique !).
• Quand et comment s'est opéré le passage de l'interprétation à la chorégraphie et comment les deux s'articulent aujourd'hui ?
Il y a quelques danses qui maturent en moi depuis des années et qui existent seulement à l'entraînement. Chorégraphier commence ici pour moi : inventer un cadre pour ces danses. À chaque fois que j'ai eu envie de monter un spectacle, c'était à partir d'un geste, d'une petite chose que j'avais envie de poursuivre, de voir jusqu'où elle pouvait nous amener. À présent, lorsque je danse, je me demande si cette danse appelle un espace ou un cadre, si cette danse a besoin d'un contexte pour pouvoir être délivrée.
Il y a sûrement un lien avec la réponse précédente. J'aime autant préparer le terrain à la danse que danser. Je passe beaucoup de temps à imaginer dans quoi j'ai envie de nous engouffrer - l'équipe et le public -.
Peux-tu nous conseiller :
- un livre dans notre centre de documentation ?
Dialogue avec la gravité d'Ushio Amagatsu
- un film ?
Chorus Line de Richard Attenborough
- un morceau de musique ?
My heart's in the Highlands d'Arvö Part
- un lieu / un paysage ?
le 104 (Paris) / le lac du Salagou
• Comment t'es-tu formée à la danse ?
J'ai commencé par une formation pluridisciplinaire, puis j'ai intégré la formation Extensions du CDCN de Toulouse en 2009. J'ai obtenu le diplôme d'état en danse contemporaine au CND de Pantin en 2016.
Enfin, j'ai souhaité approfondir mon regard et ma sensibilité sur le geste en optant pour le cursus long en Analyse Fonctionnelle du Mouvement.
• Ta pratique est nourrie par l'Analyse Fonctionnelle du Corps dans le Mouvement Dansé, en quoi cela consiste ?
L'AFCMD est une pensée sur l'économie du geste. C'est une plateforme qui rassemble énormément de pratiques. Elle permet d'avoir une bonne connaissance anatomique et biomécanique associées à l'expérience sensible et somatique. Elle ouvre le regard et apporte une grille de lecture sur le mouvement du corps physique et émotionnel.
• Tu développes une recherche chorégraphique qui questionne le sensible et l'indicible, comment matérialiser cela par la danse ?
Au départ, j'ai une sorte de cartographie des émotions que je souhaite faire émerger de la pièce. C'est ce qu'elle va inscrire comme sentiments qui me guide. Pour aborder l'immatériel et l'indicible, le plateau est épuré et vibrant. Le récit chorégraphique se dessine entre ces vibrations. Il y a donc la nécessité de passer par plusieurs couches pour soustraire et arriver à une forme abstraite.
• Tu es actuellement en recherche pour une pièce à venir en écho à Mr. Splitfoot (solo, création 2021) que nous présentons cette saison, peux-tu nous en dire plus ?
Fictive est un solo/duo dans les bois pensé comme la photo inversée ou en négatif de Mr. Splitfoot. Elle propose une profondeur de champ de 50m, et joue sur plusieurs plans.
C'est à travers un tissu rectangulaire noir et translucide, écran fictif en mouvement que le·la spectateur·rice est invité·e à fantasmer la forêt qui change de couleur et de forme.
Peux-tu nous conseiller :
- un livre dans notre centre de documention ?
Rêver l'obscur de Starhawk
- un film ?
Cemetery of splendour d'Apichatpong Weerasethakul
- un morceau de musique ?
Redom Solid de Hecq
- un lieu / un paysage ?
Le chemin de campagne en bas de chez moi, en voiture, de nuit, lumières extérieures et celles de mon tableau de bord.
• Comment es-tu arrivée à la danse, quelles sont tes sources d'inspiration ?
J'ai suivi un parcours assez classique. Jeune, j'ai appris le Jazz dans l'école de ma commune, Aussonne, puis au Lycée j'étais en horaires aménagés au CRR de Toulouse en danse classique, pour finir au CNSMD de Lyon en danse contemporaine.
Aujourd'hui, je suis très inspirée par des chorégraphes qui cherchent à développer des « danses de sensation », je pense notamment à la chorégraphe Meytal Blanaru et dans un tout autre registre, à la pensée du geste de Loïc Touzé.
• Quelle serait ta définition de la chorégraphie ?
Mon point de vue sur la question varie et évolue tout le temps, mais si je dois donner une réponse aujourd'hui, je dirais que selon moi la chorégraphie est un espace dans lequel des messages cherchent à être transmis par le corps et par tout ce qui le constitue, pour venir toucher, interroger celui·celle qui regarde.
• En 2020, tu as créé la compagnie La Ronde, implantée à Toulouse : quels sont tes axes de recherches ?
J'ai un fort intérêt pour la psychologie humaine.
J'observe avec fascination les gens et les réseaux de relation, de fonctionnement qui nous régissent, nous humains. Ce terrain thématique regorge de tremplins créatifs. Je monte des projets chorégraphiques, d'abord pour venir prolonger un certain plaisir de recherche qui m'est personnel, mais surtout parce qu'il me semble que ce sujet peut parler à chacun·e.
• Quels sont le sujet et la matière traversés par ta future pièce Quelques choses (création 2025) ?
Dans ce trio, je cherche à interroger le rapport que l'on entretient avec les objets et les choses. Qu'est ce que les choses disent de nous, de nos quotidiens, de nos corps et de nos névroses ?
Les trois protagonistes semblables à des chercheur·euse·s inventent et donnent à voir une multitude d'expériences et de situations avec la chose, jusqu'à devenir elles·eux-mêmes objets de l'expérience.
Peux-tu nous conseiller :
- un livre dans notre centre de documentation ?
Écrits : 1991-2011 de Claude Régy
- un film ?
Holy Motors de Leos Carax
- un morceau de musique ?
La vie de tous les jours de Jacques
- un lieu / un paysage ?
Une bow-window (avec vue sur la mer ou sur les montagnes ou sur une rue passante).
Ces trois artistes seront en résidence à La Place de la Danse au cours de la saison.
Sylvain Huc
Cie Sylvain Huc
Après une formation universitaire en histoire et histoire de l'art où il achève un essai d'anthropologie politique en histoire grecque, c'est de manière abrupte et inattendue qu'il découvre la danse contemporaine. Formé au CDC de Toulouse, son travail se caractérise par une approche avant tout physique et très attachée au corps.
Il sera à la manœuvre du Bloom Festival 3e édition
auquel nous nous associons joyeusement. Il interviendra également auprès de la formation Extensions.
Photo ©Erik Damiano
Marta Izquierdo Muñoz
[lodudo] producción
Venue à la danse sur le tard après des études de psychologie à Madrid, sa ville natale, elle pratique la danse avec un certain appétit (ballet, jazz, contemporain, flamenco, clubbing) avant de signer ses premiers projets personnels et créer sa compagnie.
Les rencontres qui nourrissent ses pièces consistent souvent à se déstabiliser mutuellement en décontextualisant le travail au contact de l'autre, dans un jeu perpétuel entre identité réelle et construite.
Elle sera l'interprète du solo que lui a transmis Robyn Orlin : in the corner the sky surrenders… dans une version inédite présentée au théâtre Garonne.
Photo ©David Rivas
Le site de [lodudo] producción
Marion Muzac
MZ Productions
Formée à la danse classique puis contemporaine, elle est passée par New York pour suivre l'enseignement technique de Merce Cunningham puis par le CDC de Toulouse pour se perfectionner. Elle mène simultanément activités pédagogiques au Conservatoire et à l'isdaT (entre autres) et projets chorégraphiques, les deux s'enrichissant mutuellement. Son travail sensible et humain met à l'honneur les pratiques amateures et intergénérationnelles.
Elle créera dans notre studio sa dernière pièce BLITZ à l'occasion du festival ICI&LÀ. Les enfants des crèches du quartier découvriront quant à eux Le Petit B spécialement imaginé pour la petite enfance. Enfin, MU fera un petit tour en région dans le cadre de « Danses en territoires ».
Photo ©Françoise Goria
Le site de la compagnie Marion Muzac